Derib est le dessinateur de Yakari, de Buddy Longway, de Red Road et de nombreux autres personnages de bandes dessinées apprécié autant des enfants que des adultes. Dans sa maison de la Tour-de-Peilz (Suisse), il vit au plus près de ses convictions et de la nature qui est, pour lui, une source d’inspiration constante.
« Mon premier dessin, lorsque j’avais 5 ans, représentait un cavalier. Je suis allé le montrer à mon père qui m’a demandé ce que c’était. Cela m’a horriblement vexé! »
Les chevaux, Derib les aime depuis sa plus tendre enfance. Le papa de Yakari, de Buddy Longway et de Red Road, était un garçonnet lorsqu’il a commencé à les dessiner en les observant alors qu’ils étaient au pré. Il les attirait avec des poignées de dents de lion « non polluées », précise-t-il.
Plus tard, vers l’âge de 18 ans, il a accepté de décorer le manège de Villars, dans les Alpes vaudoises, contre des cours d’équitation. Quelques mois à peine après avoir appris à se tenir plus ou moins en selle, il était chargé d’apprendre à monter à de nouveaux élèves. Une expérience audacieuse pour laquelle il était rémunéré 50 centimes par élève.
Les animaux, Claude de Ribaupierre les aime tous. Parmi eux, le bison l’a marqué profondément. « Je devais avoir six ou sept ans quand j’ai reçu, pour Noël, l’un des plus cadeaux de mon enfance, se souvient-il. Il s’agissait d’un bison en terre cuite. Je l’ai toujours. Pour moi, c’est un animal mythique, Il a une stature très particulière. Et c’est lui qui a fait vivre les indiens. »
A travers Yakari, petit personnage qui apprend aux enfants le respect de la nature qui les entoure, il a donné vie à des animaux aussi variés que l’aigle, le castor ou le loup. Avec ce dernier, il a partagé une expérience unique. De passage au Gévaudan, il a eu l’occasion de visiter la réserve de loups. « J’ai pu rentrer dans le parc et dessiner les loups qui se trouvaient tout près de moi, raconte-t-il. Le regard de cet animal est poignant. Il dégage une grande tristesse, de la détresse et de la nostalgie. On dirait qu’il vient du plus profond des âges… »
Parmi les animaux domestiques, Derib voue une affection profonde au chat qu’il considère comme l’animal le plus adapté à la civilisation, tout en ayant conservé sa liberté. La famille de Ribaupierre connaît bien les chats. Elle en possède trois, et vient de perdre, en décembre, le quatrième p âgé de tous, à vingt ans.
Mais c’est bien le cheval qui a marqué et marque toujours la vie de Derib. Dans ses deux albums, ils sont omniprésents.
Une fois qu’il a appris à monter, Derib a chevauché durant plus de trente ans. Il a également adopté quelques chevaux, mais à chaque fois dans le but de les sauver de la boucherie. Comme le premier pur-sang qu’il a acquis, Darky. « Il avait eu les tendons antérieurs claqués, ce qui le condamnait à une mort certaine. Nous l’avons acheté et soigné. Il a guéri, et a même participé à d’autres courses, en amateur, qu’il a gagnées! »
Au fil du temps, le cavalier a fait plusieurs chutes violentes. Depuis une douzaine d’années, il n’éprouve plus le besoin de monter, mais voit toujours des chevaux chaque jour. Chez eux, il aime leur générosité. « Sans chevaux, notre civilisation n’existerait pas, rappelle-t-il. Ils ont été très mal utilisés et sacrifiés pendant les différentes guerres. Mais ils nous ont permis de conquérir le monde. Je trouve que nous ne les respectons pas assez. Nous n’avons pas une relation proportionnelle à ce qu’ils nous ont donné. Nos chevaux, surtout en compétition, sont exploités. Ils mériteraient mieux aujourd’hui. De plus, à mes yeux, esthétiquement, c’est un des plus beaux animaux. »
L’amour de Derib pour la nature ne se limite pas aux chevaux ou aux animaux. Même s’il est ému de voir un oiseau ou un chat se livrer à « leur petit boulot d’oiseau ou de chat, malgré les orages, malgré tout ce qui peut venir entraver leur quotidien. Ce sont de grands exemples ».
La montagne fait également partie de ses lieux de prédilection. De l’âge de trois mois à quatre ans, il a vécu chaque été au-dessus de 2000 mètres. « J’ai des souvenirs de rochers et d’herbes desséchées, explique-t-il. Je me sens très bien au Glacier de Ferpècle. J’ai eu la Dent Blanche devant les yeux pendant quatre ans. C’est un peu ma montagne. Même si j’aime le lac et le Gramont, je suis moins touché par l’environnement d’un jardin que par celui de la montagne. Là-haut, un endroit a été baptisé le Petit Paradis. Lorsque mon père était encore en vie, nous y allions au moins trois mois par an, en famille. A présent, nous y retournons régulièrement, mais pour une journée seulement. »
A travers le dessin, Derib entraîne les lecteurs à travers des aventures toujours imprégnées de nature sauvage ou complice.
Et il le reconnaît volontiers: son métier est révélateur de la personne qu’il est vraiment…