Georges Delaselle était assureur à Paris lorsque, en 1896, il a été pris d’un véritable coup de foudre pour l’île de Batz, en Bretagne.
Amoureux des jardins, il réalise que l’île profite du Gulf Steam, ce courant océanique venu des tropiques.
Le climat local s’en trouve adouci, ce qui provoque une idée inattendue dans le cerveau créatif du nouveau venu: créer ici un jardin colonial.
En plein Finistère, au large de Roscoff, il fallait oser…
Il l’a fait.
Pendant dix ans, de 1898 à 1918, il sera partout à la fois, dirigeant les travaux et les plantations, modelant un cordon de dunes artificielles plantées de végétaux de protection, creusant une cuvette profonde de cinq mètres dont les bords seront travaillés en terrasses.
Il creuse tant et si bien qu’il met à jour une nécropole datant de l’Age de Bronze, dont il reste encore dix tombes visibles aujourd’hui.
Le jardin, lui, prend forme petit à petit.
En mai 1918, Georges Delaselle apprend une nouvelle qui va changer sa vie: il est atteint de tuberculose.
Pour lui, il n’y a plus de temps à perdre.
Il quitte Paris, démissionne et s’installe définitivement dans son Jardin de l’Ile de Batz.
C’est à partir de là qu’une véritable légende va prendre forme.
Georges Delaselle aimait la solitude.
Son jardin, si singulier, s’y prête.
Dans cet univers de plantes mystérieuses, encore inconnues sous nos latitudes, il crée un havre de tranquillité, magique et insolite.
Un véritable Facteur-Cheval du jardin…
Mais la maladie ronge le maître des lieux.
Il cède son paradis qui va subir trente années d’abandon, puis deux hivers glacés, en 1953 et 1965, qui feront périr de nombreuses plantes.
En 1989, il ne reste plus que 49 espèces végétales sur les 102 estimées par son créateur.
Dans les années 1990, le Conservatoire du littoral reprend le jardin et lui donne un nouveau souffle.
Aujourd’hui, entre figuiers de Barbarie, camphriers importés de Chine, dattiers venus des Canaries, 2000 essences tropicales s’épanouissent sous le ciel breton.
Monsieur Delaselle peut reposer en paix…
Et les amateurs de botanique s’en donnent à coeur joie.
Martine Bernier