Durant toute son existence, Cézanne a vécu une passion dévorante.
Pas pour une femme, non…
Pour une montagne.
La montagne Sainte-Victoire, qui l’a obsédé pendant toute sa vie.
Il l’a peinte sans discontinuer, sous toutes les coutures, par tous les temps, en la mettant en scène dans sa vérité la plus pure.
Il l’a sublimée, l’a réinventée, en a multiplié les versions.
Celle que j’ai choisie pour illustrer ces quelques lignes est ma préférée et se trouve à Londres (The Courtauld Gallery)
Des critiques d’art et des historiens ont bien tenté de partir sur les traces de l’artiste pour retrouver les angles qu’il choisissait, les lieux où il a posé son chevalet.
Peine perdue…
La démarche de Paul Cézanne était bien plus complexe qu’ils ne l’imaginaient.
Sa montagne, il l’a peinte telle qu’il l’a voyait, avec une touche poétique, en recommençant sans cesse celle qu’il a passé des années sans pouvoir la reproduire.
Il parlait d’elle comme d’un être humain…
« Elle participe, toute bleutée, à la respiration ambiante de l’air »…
Il l’a campée dans des paysages évolutifs, finissant par l’intégrer dans des constructions quasi géométriques, s’éloignant des modèles attendus.
Il lui a donné des couleurs irrésistibles, l’a honorée pendant vingt ans.
Du peintre provençal au caractère solitaire et un peu sauvage, nous reste une oeuvre très riche.
Mais, pour moi, aucune de ses autres toiles ne me trouble autant que celle qu’il a consacrée à son « chemin de passion »…
Martine Bernier