Depuis quelque temps, j’ai changé le mode de récompense de Pomme, ma demoiselle bichon havanais.
Jusqu’ici, dès qu’elle s’était bien comportée, je lui offrais une friandise qu’elle allait déguster dans son panier.
En revenant de promenade, avec un toilettage ou une douche, elle filait se placer devant le « placard de Pomme » et attendait.
Un matin, je me suis dit que nous allions rendre la chose plus ludique.
Plutôt que de lui donner directement sa récompense, j’ai décidé d’en cacher de minuscules dans la maison.
Et si possible dans des endroits qui lui demandent un petit effort physique et un soupçon de débrouillardise.
J’ai commencé par en déposer deux sur les premiers rayonnages de deux des bibliothèques de mon bureau.
Mon Mogwaï, pour repérer son trésor et le prendre, doit se hisser sur ses pattes arrières.
Lorsque j’ai expliqué ce nouveau jeu à mon Capitaine, il a trouvé l’idée excellente.
S’emparant du paquet de mini friandises il a élargi l’activité en disséminant ces irrésistibles rondelles sur plusieurs bibliothèques, dans différentes pièces.
En conséquence, les rations de nourriture sont diminuées au profit de ces nouveaux apports caloriques gagnés au prix d’un effort qui semble plaire à Pomme.
Pour elle a commencé un joyeux jeu de piste à travers la maison.
Avec moi, elle sait que je ne la récompense que lorsqu’elle l’a mérité.
Mais elle connaît suffisamment bien Celui qui m’accompagne pour savoir qu’il ne fonctionne pas de la même façon.
Dès qu’il est là, elle sait que tout est possible!
Hier soir, alors que nous étions seules, je l’ai vue se lever de son panier prise par une illumination soudaine.
Elle a consciencieusement fouillé chaque bibliothèque.
Dans un coin, elle a trouvé l’un de ses jouets caché par mon Capitaine à son intention.
Et plus loin, ô miracle, elle a déniché une friandise oubliée.
Debout sur ses pattes arrières, elle l’a dégustée en self service avant de terminer sa tournée par une dernière incursion du côté du fauteuil du chef.
Elle n’y monte jamais lorsqu’il est absent.
Cette fois, d’un bond, elle y est monté, a inspecté la bibliothèque devant laquelle il se trouve, et est redescendue pour venir se coucher à côté de moi.
Elle m’a lancé l’un de ces longs regards accrochés au mien, qui semblent me sonder.
En lui ébouriffant la tête, je n’ai pas pu m’empêcher de lui dire:
– Honte à toi! Tu es en train de devenir bassement matérialiste.
Je ne sais pas si c’est l’indifférence ou le poids de la honte mais… elle a fermé les yeux et a fait semblant de dormir.
Martine Bernier