Hier, en fin de journée, j’étais seule au Nid lorsque la sonnette de la porte d’entrée a retenti.
Devant moi, une jeune femme souriante, portant un petit carton.
Avant même qu’elle ait ouvert la bouche, je savais ce qu’elle allait me dire: qu’elle faisait partie d’un groupe d’étudiants en voyage d’études à travers l’Europe et que, pour financer leur voyage, ils vendaient des articles divers.
Cette fois, Pâques oblige, c’était des oeufs décorés.
Elle se disait Italienne, avait un accent qui ne ressemblait pas aux origines annoncées, mais qui fleurait plutôt les Balkans…
C’est cyclique, ils reviennent comme les hirondelles, une ou deux fois par an.
Allez savoir pourquoi… je ne suis pas spécialement dupe, mais je ne laisse pour ainsi dire jamais ces personnes repartir les mains vides.
C’est sans doute idiot, je sais… on ne se refait pas.
Hier, je lui ai expliqué que je ne lui prenais rien (je connais les tarifs exorbitants proposés pour ces cartes, oeufs ou autres babioles qui ne coûtent que quelques francs à la base en magasin), mais que j’allais lui donner quelque chose pour la soutenir.
Après lui avoir tendu un billet, j’ai voulu lui faire passer mon propre message puisqu’elle m’avait fait connaître le sien.
Et nous avons eu une petite conversation légère mais… insolite:
– D’où êtes-vous en Italie?
– De Bologne.
– Je ne l’ai jamais visitée. J’aime votre pays, particulièrement la Toscane.
– Ah oui, c’est joli.
– Vous connaissez Florence?
– Heu… non, mais maintenant, j’aime bien la Suisse, avec ses montagnes, le chocolat…
– Nous avons les montagnes et le chocolat… vous avez eu Léonard de Vinci. C’est bien aussi!
Nous avons parlé quelques instants au cours desquels j’ai réalisé que sa connaissance de l’Italie était très limitée pour quelqu’un qui disait y vivre.
Finalement, alors que j’allais refermer la porte, je lui ai glissé:
– J’espère que vous aurez de la chance avec votre vente d’oeufs.
– Si tout le monde est comme vous, ce sera bien.
– Vous savez… c’est parce que je pense que faire du porte-à-porte doit être extrêmement difficile que je vous ai répondu. Que ce soit pour un voyage d’études ou pour une autre raison, voir les portes se fermer doit être dur.
– C’est vrai… il faut aimer les gens pour faire.
Nous nous sommes saluées et elle est repartie.
Sa phrase m’est restée dans la tête: « Il faut aimer les gens pour faire cela ».
Etrange…
Martine Bernier