Veni, vidi, vici!

Il était environ 22 heures, un mercredi soir ordinaire, du moins jusqu’à ce que la situation bascule dans l’absurde.
Nous étions au lit, mon capitaine et moi, regardant une vidéo humoristique, quand une question m’a échappé:
– As-tu déjà fait des bras de fer?
Il a souri et répondu oui, bien sûr, comme si c’était une évidence.
J’ai voulu essayer…
L’idée était saugrenue, je sais.
Moi, avec mes muscles comparables à ceux d’une huître (comme je l’ai d’ailleurs fait remarquer à mon adversaire avant le combat), une épaule capricieuse qui me rappelle souvent son existence, face à lui, force tranquille, géant bienveillant qui, par principe, n’écraserait jamais une mouche, mais qui ne cède jamais un pouce de terrain quand il le faut.
Je lui ai bien recommandé de ne pas me faire mal.
Il a hoché la tête.
Nous avons placé nos coudes sur le lit, mains jointes… le duel pouvait commencer.
Premier round: rien.
J’ai beau appuyer de toutes mes forces, son bras reste aussi immobile qu’un poteau télégraphique.
Mais il n’attaque pas, bon prince… il se contente de résister, sans effort.
Deuxième tentative, même punition.
Lui ne force même pas, il me regarde avec une douceur compatissante, comme un maître d’arts martiaux face à son élève du premier jour.
Son bras ne bouge toujours pas d’un millimètre.
Alors, avant la troisième manche, j’annonce d’un ton solennel que cette fois, je vais convoquer toute mon énergie, mobiliser l’intégralité de ma puissance latente et la diffuser dans mon bras.
Je ferme les yeux, prends une grande inspiration et, dans un élan théâtral, je pose ma main dans la sienne.
Il ne se méfie pas.
Et c’est là que j’ai agi.
Une infime seconde d’inattention de sa part, un mouvement surprise… et zou!
Le bras de mon colosse a cédé, la victoire était mienne !
J’ai été tellement surprise que j’ai eu le fou rire de ma vie.
Je riais à en pleurer, et pour la première fois, il a ri autant que moi.
Entre deux éclats de rire, il a secoué la tête, revenant sur mes déclarations d’avant-match: « C’est bien la première fois que je me fais battre par un mollusque…« 
Le lendemain matin, encore triomphante, j’entre dans la cuisine avec l’assurance d’une conquérante, m’adressant à nos trois bichons:
– Peuple de France, une ovation pour celle qui a vaincu le géant des Carpathes!
Mon Capitaine sourit, s’installe à table et la conversation se poursuit, entrecoupée de rires.
– N’oublie pas qu’il faut avoir le triomphe modeste.
– Mais c’est le cas! Parce que si je me laissais aller, ce serait tout autre chose!

Avant de partir vaquer à ses occupations, mon Capitaine est passé dans mon bureau et m’a dit: Je dois aller m’acheter des protéines, il faut que je me refasse des muscles …
Quoi qu’il en dise, mon exploit restera gravé dans l’histoire.
Même si j’ai parfaitement conscience que mon noble adversaire n’en restera pas là!
Je m’attends au pire… sa revanche sera terrible, mais peut-être pas sur le même terrain !

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