Kaléidoscope 2: Le Bal des Vampires

La semaine est décidément éreintante…
Il faut environ deux heures de route pour se rendre de chez nous à Besançon.
Un rendez-vous là-bas nous mange donc la majeure partie de la journée…
Il y en a eu trois à l’heure où j’écris ces lignes.

Dès que je peux retrouver un horaire normal, je fonce dans mon bureau.
J’ai commencé l’écriture d’un nouveau livre, une biographie, et le personnage devient mon compagnon de route pour quelques mois, je pense.
Partir sur ses traces, reconstituer sa vie à travers des écrits est un véritable bonheur…

Je n’en reviens pas d’avoir un quotidien aussi riche…
Même les visites médicales sont parsemée de situations très drôles et me permettent de vivre des moments de complicité légers avec le personnel soignant.
Un exemple a été paradoxalement hilarant.
L’examen passé lundi demandait à ce que me soient injectés deux produits colorants pendant que la spécialiste oeuvrait.
Evidemment, lorsqu’il a fallu placer l’aiguille pour l’intraveineuse, l’éternel problème s’est posé: je suis pleine de bonne volonté, mais… impiquable!
L’infirmière, pourtant rompue à ce genre d’exercice, a dû s’y reprendre à cinq reprises avant de pouvoir enfin poser l’aiguille.
Comme j’ai l’habitude, ma méthode est de dédramatiser le moment en plaisantant, ce qui détend toujours l’atmosphère.
L’examen, se déroule, puis je suis invitée à récupérer un quart d’heure avant de le poursuivre, pendant qu’une autre personne effectue le même exercice en version raccourcie.
Une fois la deuxième partie terminée, j’ai à peine le temps de retrouver mon Capitaine que je suis rappelée dans le bureau de la jeune ophtalmo qui m’explique qu’il y a bel et bien un souci qu’il va falloir traiter.
Et pour cela, il faut me revoir le surlendemain, mais pas avant d’avoir fait des analyses de sang, là, maintenant.
C’est une bonne chose: ainsi, tout sera fait en même temps et la cause du problème sera identifiable.
Je la suis docilement.
Parmi les infirmières, ma réputation d’impiquable a déjà fait le tour.
Celle qui a réussi l’exploit de me poser la perf vient me dire au-revoir alors qu’elle a terminé son service, en me souhaitant un « bon courage » navré.
J’ai trouvé cela très gentil…
Sa collègue arrive avec une boîte contenant des flacons pour le sang…
Comme il y en avait vraiment beaucoup, je les ai comptés.
Et j’ai cru à une farce.
– Dix-neuf!! Vous êtes rigolote… Vous essayez de me faire croire que nous allons signer une nouvelle version de Dracula! Et là, vous allez me dire que vous voulez remplir tout cela?
Elle a eu un air très gêné:
– Heu… oui…
– Vous plaisantez?
– Non… il faut vraiment faire des analyses approfondies.

Hum.
Dix-neuf flacons alors que, lorsqu’il s’agit d’en remplir trois ou quatre, c’est déjà le bout du monde pour ceux qui tentent de le faire… je sens qu’il va y avoir du sport.
La jeune femme, qui était vraiment mal à l’idée de devoir s’atteler à cette tâche, m’a piquée deux fois, puis elle a rendu les armes.
– Je vais chercher ma collègue!
Sa collègue, elle aussi charmante, a 37 ans de métier et ne craint pas les « cas récalcitrants ».
Elle a fait deux tentatives et a pu commencer ses prélèvements en visant une veine de la main.
Nous continuions toutes à plaisanter, histoire de passer le temps.
La première infirmière, restée pour seconder sa collègue, a soufflé:
– Je suis désolée de devoir vous laisser un garrot serré aussi fort…
– Ce n’est pas grave, c’est pour la bonne cause!
– Oui, mais quand même… j’espère qu’il ne faudra pas vous couper le brasi
– Bah… j’en ai deux et je suis droitière!
Elles se sont regardées, perplexes, et ont éclaté de rire.
La glace était bien rompue…
Et ça a aidé car quelques instants plus tard, plus une goutte ne coulait dans les tubes, il a fallu recommencer dans l’autre main.
Le ton était toujours aussi léger, à tel point que l’ophtalmo, qui avait assisté à toutes les péripéties de la journée, est venue nous rejoindre.
Elle m’a annoncé qu’il faudrait que je passe ensuite au secrétariat pour reprendre un rendez-vous avec le spécialiste des maladies infectieuses des yeux.
Je lui ai dit que j’allais le faire… espérant que nous aurions terminé avant que le secrétariat ne ferme.
Elle est partie et nous avons sagement continué à remplir nos flacons.
Cinq minutes plus tard, elle revenait avec une feuille de papier qu’elle m’a tendue: elle était allée elle-même me prendre un rendez-vous!
– Vous n’y seriez pas arrivée: le secrétariat était sur le point de fermer…
Quand je dis que ces personnes sont adorables…
Lorsque nous sommes arrivés au terme des 19 flacons, l’infirmière a retiré l’aiguille et m’a dit:
– C’était un record, pour moi, d’autant plus sur une personne qui a des veines aussi difficiles. Mais avec vous, ça a été un plaisir.
– Ca a été un record pour moi aussi, que j’espère ne pas avoir à battre! Et le plaisir a été partagé.

C’était vrai: curieusement, ça a été un bon moment!

par

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *