Robert Redford…

C’était en 1973 ou 74, j’avais 14 ou 15 ans.
Ma mère avait accepté que j’aille de temps en temps au cinéma avec une amie, ce qui était tout à fait inespéré pour moi.
C’est là qu’un soir, j’ai vu Nos plus belles années, découvrant en même temps Robert Redford et Barbra Streisand.
Ce film est resté mon préféré durant très longtemps.
C’est lui qui a marqué le départ de mon attachement à cet acteur.
J’ai vu pratiquement tous ses films, dont certains plusieurs fois.
Avec sa beauté exceptionnelle, cet homme aurait pu se contenter de se cantonner à des comédies romantiques.
Mais non…
Dans les années qui ont suivi ma première découverte, je me suis pris quelques claques magistrales: avec les Trois jours du Condor j’ai compris que le monde et la politique étaient beaucoup plus noirs que je le croyais, dans Les hommes du Président , avec Dustin Hoffman, il m’a permis de comprendre le scandale du Watergate.
J’ai tellement aimé que j’ai vu tous les films dans lesquels il avait tournés auparavant, tous des succès, avec des coups de coeur gigantesques pour Jeremiah Johnson, Brubaker et, bien plus tard, le sublime Out of Africa.
Puis je n’ai plus arrêté: j’ai vu à peu près chaque film dans lesquels il a joué ou qu’il a tourné.
Pour certains, je les ai vu plusieurs fois.
Et j’ai commencé à être attentive aux interviews qu’il donnait.
A force de chercher (à une époque où internet n’existait pas!), j’ai fini par me procurer le livre qu’il a écrit en 1979: La piste des hors-la-loi.
Le texte raconte un voyage qu’il a fait avec ses collaborateurs à travers les lieux historiques de l’Ouest américain associés à la légende des hors‑la‑loi, les “outlaws”.
Il y évoque quelques personnages hauts en couleur et la vie de l’époque, ainsi que les gens qui vivaient encore dans les zones marquées par cette histoire. 
Ce qu’il exprimait en interview me faisait découvrir un homme de valeurs, engagé bien avant l’heure dans la protection de sa région et de l’environnement, ainsi que dans la défense des peuples Amérindiens et des peuples autochtones.
Lorsque, en 1981, il a fondé le festival de film de Sundance, du nom du lieu où il vivait dans l’Utah, j’ai été touchée par son désir de soutenir le cinéma indépendant, de créer un lieu de développement et d’apprentissage, et de mettre en lumière des films qui n’auraient eu que peu de chances d’être vus autrement.
Sa vision du cinéma était généreuse, allant à l’encontre de l’industrialisation de ce domaine…
Entre ses engagements civiques et sa carrière d’acteur, de réalisateur et de peintre – sa première vocation -, j’ai continué à le suivre.
Il écrivait parfois des articles d’opinion, prenant position sur des sujets qui lui tenaient à coeur.
J’avais lu un article de lui publié le 26 novembre 2019 pour NBC News dans la section “Think”. 
Dans cet article, il accusait l’administration Trump d’être une « monarchie déguisée » » » et disait qu’il était “temps que Trump parte”. 
Il critiquait le fait que beaucoup de membres du Congrès privilégient leur loyauté de parti plutôt que leur serment de défendre la Constitution des États‑Unis.
Puis il avait soutenu la candidature démocrate à la dernière élection présidentielle, relevant que Trump n’avait pas de « boussole moral ».
Autant dire qu’il ne devait pas être très heureux, ces derniers mois…
A la fin de l’année dernière, j’ai regardé sur Netflix le film Nos âmes la nuit, qu’il a tourné en 2017 avec Jane Fonda, avec laquelle il était si complice.
Son dernier film…

Mercredi, quand mon Capitaine est rentré, il m’a dit: Un acteur est décédé, mais je ne sais pas si c’est Robert Redford ou Robert de Niro.
Je suis allée vérifier… et j’ai compris.

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