Depuis toujours, je suis intriguée par le nombre de mots qui compose réellement le vocabulaire d’un être humain.
Les spécialistes ont tenté d’y répondre, et les chiffres avancés dans les publications sur le sujet en disent long sur nos capacités à dire le monde.
Un enfant de 6 ans, par exemple, comprend environ 2 500 à 3 000 mots, mais il emploie couramment environ un millier.
A 12 ans, son vocabulaire passif, c’est-à-dire les mots qu’il comprend, dépasse les 6 000 mots, tandis que son vocabulaire actif tourne autour de 3 000 à 4 000.
À 16 ans, un adolescent connaît déjà entre 10 000 et 12 000 mots, mais en pratique, il en mobilise environ la moitié. Un adulte moyen, dans la vie quotidienne, comprend entre 20 000 et 35 000 mots selon son niveau d’éducation, mais il n’en utilise régulièrement qu’entre 4 000 et 5 000.
Chez les personnes dites lettrées, celles qui lisent beaucoup, qui écrivent, qui s’expriment souvent, le vocabulaire passif peut grimper jusqu’à 60 000 ou 70 000 mots, et leur vocabulaire actif navigue entre 10 000 et 20 000 mots, parfois plus selon les cas.
Ces écarts révèlent déjà l’importance du langage dans la structuration de la pensée.
Plus notre répertoire lexical est vaste, plus nos nuances de perception et d’expression sont fines.
À l’inverse, les études menées auprès de jeunes déscolarisés ou repliés dans un langage restreint montrent qu’ils ne maîtrisent souvent qu’entre 400 et 800 mots réellement utilisés.
Leur compréhension globale peut atteindre 2 000 à 3 000 mots, mais reste très limitée.
Le dossier de formation “Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur la langue” (FODEM – université Paris-Descartes) écrit ceci: Une part importante des jeunes ne possède que quelques centaines de mots, quand il leur en faudrait plusieurs milliers pour tenter d’examiner et d’accepter pacifiquement leurs différences.
Cette pauvreté lexicale n’est pas seulement un marqueur social, elle devient une entrave à la communication et à la réflexion.
Car le vocabulaire n’est pas qu’une question d’élégance ou de culture, c’est la trame même de la pensée.
On ne peut formuler que ce que l’on est capable de nommer.
J’ai toujours été convaincue que la culture et la communication sont essentielles à l’évolution de chaque être humain.
Plus elles s’appauvrissent, plus l’expression des émotions devient difficile.
Et lorsque les mots manquent, il reste souvent la colère, la frustration ou la violence pour dire ce que l’on ne sait plus exprimer autrement…