Mon Capitaine monte au front, suite.

Lundi matin,  j’ouvre la porte du poulailler avec une question à l’esprit: les nouveaux aménagements de mon Capitaine ont-ils réussi à décourager les souris?
J’ouvre donc, j’allume, je caresse mes poules blotties au sommet de leurs abris et je baisse les yeux vers le sol.
Là, devant la mangeoire, se trouve de petites crottes de souris…
L’ennemie a vaincu la résistance de Fort Apache.

Les efforts de mon Capitaine n’ont pas suffi.
Veni, vidi, mais pas encore vici.

Je vais faire mon rapport au Grand Ordonnateur de la Bataille  qui ne laisse rien paraître de ses sentiments, mais qui me dit qu’il passera dans la matinée faire le point.
Le hic… c’est que, à présent que le sol en béton n’est plus couvert de foin, les poules n’osent plus descendre de leurs quartiers de nuit.
Lorsque je retourne les voir, deux heures plus tard, les déjections de souris ont disparu, sans doute évacuées par les oiseaux qui entrent nombreux dans le poulailler.

Quant aux poules, elles n’ont toujours pas osé sauter pour quitter les lieux et aller manger.
Mes quatre protégées sont perchées sur le bord des plates-formes, piaillent à qui mieux-mieux, mais aucune n’ose regagner le plancher des vaches.

– Mais??? Et alors, les Boulettes?  Vous ne descendez pas? Regardez ce que je vous donne, ce matin… Kaki, tu viens? Et toi, Plume? Praline, peut-être? Ou Chine?

Je dépose des grains de maïs concassés dans leur mangeoire, sachant que, en temps normal, elles n’y résistent pas.
Mais cette fois, elles crient de plus belle… et n’osent toujours pas sauter.
Aux grands maux les grands remèdes: je les prends une à une et les posent sur le sol.
Mon initiative ne leur plaît pas du tout, mais elles sortent en courant, et filent en direction de coins de l’enclos qu’elles affectionnent.

De retour dans la maison, je vais expliquer à mon grand homme que les traces laissées par les souris ont disparu, et que les poules craignent visiblement le sol en béton.
Il m’a regardée avec une lueur d’ironie dans les yeux, et a déclaré:
– Bien sûr… Les poules ont peur du sol. Quant aux  souris, elles ont sorti leur petit balai et ont nettoyé les lieux avant de partir, ni vu ni connu.

Oh!!!
Ma parole est mise en doute avec une mauvaise foi manifeste!
Ciel!
Je suis retournée dans mon bureau, drapée dans ma dignité offensée.
Dix minutes plus tard, j’ai vu passer mon Capitaine poussant à nouveau sa brouette en direction du poulailler.
Pas question de se déclarer vaincu.

Je me suis concentrée sur mes cours et ne suis retournée sur le terrain de hostilités que près de deux heures plus tard.
En arrivant, j’ai vu deux pieds.
Ou plutôt deux semelles.
L’Homme avait investi les lieux.
A genoux dans le poulailler, mon Capitaine oeuvrait.
Il avait simplement tout démonté à l’intérieur de la pièce.

– Tu as trouvé quelque chose?
– Oui. Il y avait deux trous ici derrière. J’ai tout rebouché. Et je vais réinstaller des étagères pour les poules. Mais pour le moment, ce sera du provisoire, avec des cartons.

C’est donc dans un poulailler entièrement refait jusque dans ses moindres recoins que mes Quatre Grâces sont rentrées le soir.
De nouvelles plates-formes en carton, bien paillées, les attendaient, les murs étaient parfaitement hermétiques, bref: le blockhaus était au top.IMG_0983
Et mes boulettes (non non, pas « poulettes »! Boulettes est le petit nom affectueux que je leur donne lorsque nous sommes dans l’intimité!) étaient visiblement ravies de découvrir leur nouvelles installations, sautant de l’une à l’autre et lançant des petits cris joyeux.
En fermant la porte, j’ai touché du bois: pourvu qu’aucun hôte indésirable ne fasse son apparition cette nuit.

Martine Bernier

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