Lui (4)

En quelques mois, j’ai reçu plusieurs courriers me demandant pourquoi je ne parlais plus de Lui.
Je répondais simplement que j’en reparlerais plus tard, que ce n’était pas le bon moment.
Aujourd’hui, je peux à nouveau le faire.

Au fil de ces derniers mois, cette relation hors du commun et hors normes s’est développée et a mûri dans la ligne de ce qu’elle a toujours été: belle, douce et joyeuse, malgré la distance.
Je continue à ne pas vouloir le cerner par des mots, mais à être émerveillée par sa façon de se comporter.
La veille de chaque examen médical difficile ou de chaque opération, il m’appelle, il est là, simplement.
Il dit que c’est le hasard, qu’il ne le fait pas exprès.
Mais le fait est qu’il est bel et bien là.
Dans ces moments-là, j’en ai bien besoin.

Quand je lui demande son avis sur un détail pratique lié à l’une de mes activités, il se met en quatre pour m’apporter son aide.
Quand il sent que mon moral décline, il me dit de penser à Monet, à ce séjour à Paris, en septembre, où il me permettra de vivre l’un de mes rêves artistiques.
Et c’est vrai que dans les pires moments, cette perspective me redonne un peu de souffle.
Il me fait rire, me parle de lui.
Il est devenu l’un de mes confidents les plus proches sans que je m’en aperçoive.
Il est sans doute celui, parmi mon entourage, qui connaît le mieux, par expérience, ce qu’impliquent les problèmes de santé que je traverse.
Comme Eric qui a vu depuis des années le chemin que je suis.
De ces soucis, nous parlons sans détours (si ce n’est ceux que je trace lorsque j’esquive d’une pirouette de peur de l’ennuyer) et ses réponses reposent sur son vécu.
Avec Lui, je n’ai pas besoin de me cacher.
A peine y a-t-il cette pudeur qui m’empêche de m’attarder sur les moments les plus difficiles.
Cette pudeur, il la connaît bien: il a la même.
Il sait les options qui s’ouvrent à moi, sait exactement de quoi je parle, ne minimise rien, sait ce que je n’accepterai jamais et tente de me faire changer d’avis à sa façon.

Il est loin, a sa vie, et moi la mienne.
Mais quand, dans la nuit, je trouve un message qu’il a laissé ou quand le téléphone sonne et que nous partons dans nos longues conversations, c’est un cadeau.
Il n’est pas obligé de faire ce qu’il fait.
Mais il le fait.

Parfois, il me taquine sur certaines expressions qui me mettent mal à l’aise:
– Tu sais, je n’arrive pas à me faire à ce mot « salut ». Pour moi, c’est un mot distant, qui veut dire que l’on est fâché ou qui marque l’indifférence.
– Ah bon? Non, ici c’est l’inverse, c’est plutôt familier, sympathique.
La conversation se poursuit.
Quand elle se termine, je lui dis au-revoir et je l’entends me répondre:
– Bon… et bien salut !
Un court silence suivi d’un double éclat de rire.
– Voyou!
Tout en gloussant, il rectifie le tir, ravi de son effet.

Au cours de ces derniers mois, j’ai eu l’occasion de le découvrir face à certaines situations bien précises.
C’est là que j’ai réalisé qu’il a un coeur d’or, ce grand sauvage discret.
Et pas seulement avec moi.
On pourra me dire ce que l’on voudra.
Mais Lui ne se contente pas de mots creux.
Il agit.
J’ai beaucoup de chance de l’avoir dans ma vie.

Martine Bernier

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