Au-dessus du village où nous habitons, perché sur la montagne, se trouve le site de Chavalon.
Chavalon est une ancienne centrale thermique désaffectée depuis 1999, alors qu’elle avait été mise en service à partir des années 1960.
Aujourd’hui, des projets sont envisagés pour transformer le site en centrale à cycle combiné utilisant le gaz naturel pour générer de l’électricité.
Pourquoi ai-je décidé de vous parler d’un sujet aussi peu poétique?
Parce que j’ai vécu un jour un épisode étrange en rapport avec le lieu.
Depuis mon arrivée en Suisse, en 1978, j’ai toujours regardé Chavalon comme une verrue sur la montagne.
Une cheminée et des bâtiments de ce type, ce n’est jamais bien beau…
Il y a quelques années, alors que nous cherchions un logement en plaine, nous nous sommes retrouvés sur la route menant au site où, disait-on, des « chalets » étaient à louer.
Le chemin m’a semblé interminable.
C’était un jour froid, venteux.
Nous sommes arrivés dans un lieu où il n’y avait pas âme qui vive.
Sous l’imposante centrale, un bout de route menait aux habitations.
Toutes identiques.
Ce n’était pas des chalets, mais des maisons style bungalows bois-béton modernes et sans âme.
Le vent faisait rouler des boules de végétaux secs qui passaient devant nous sur la route.
Comme dans certains westerns.
Le silence, le lieu, le vent, l’architecture… nous avions l’impression de nous trouver dans un film de sciences-fiction.
J’ai quitté les lieux avec un sentiment de malaise.
Jamais je n’aurais pensé qu’un jour, j’habiterais non loin du site.
Le chanvre du cultivateur Bernard Rappaz y a été placé sous séquestres au début des années 2000.
Pour le moment, plus rien ne bouge à Chavalon, si ce n’est, parfois la présence d’adeptes de base jump qui se jettent depuis la cheminée avec leur parapente.
Je trouve toujours le site aussi étrange et laid.
Mais les jours où le ciel est menaçant, les jours où la brume se fait enveloppante, ou même les jours de ciel d’azur, la silhouette de la centrale se fait tour à tour inquiétante, fantomatique ou majestueuse.
Elle a été nécessaire à la vie, attend une deuxième existence.
Laide, sans doute, mais à l’atmosphère troublante… comme souvent dans les sites industriels.
Martine Bernier