Parmi les nombreux professeurs de math que j’ai eus pendant mes études, je n’ai ressenti de réel coup de coeur pour aucun d’entre eux.
Simplement parce que la matière qu’ils enseignaient me rebutait.
Pourtant, je n’ai jamais oublié cette anecdote vécue avec l’une d’entre elles.
Ce matin-là, j’étais préoccupée.
Pour un devoir de philo, j’avais décidé de me pencher sur le concept de l’infini.
Or… l’infini me dépassait, et me dépasse évidemment toujours.
Je me suis donc dit qu’il fallait que je pose la question à une matheuse pour avoir son avis.
A la fin du cours qui terminait cette matinée, je suis allée la voir et lui ai demandé ce qu’elle pensait de l’infini.
Elle a réfléchi un instant et a commencé par me demander quel était le plus grand nombre que je pouvais imaginer.
J’ai lancé des chiffres au hasard, et elle a souri.
Elle m’a dit:
– Quel que soit le nombre que tu choisis, tu peux toujours lui ajouter 1, et encore 1, et encore , et toujours 1… il n’y a pas de limite. C’est l’infini.
– Je n’arrive pas à le concevoir…
– C’est normal: l’infini est trop grand pour l’esprit humain. Tu peux aussi imaginer l’éternité en imaginant une fourmi, si tu veux.
– Une fourmi?
– Oui. Imagine-la faire plusieurs fois le tour de la Terre. A raison d’un mètre par million d’années, lorsque les pattes de ta fourmi auront usé la Terre jusqu’à ce qu’elle n’ait plus que la taille d’un petit pois, l’éternité n’aura pas encore commencé.
Ce jour-là, je n’ai pas réussi à manger.
Le concept de l’infini m’avait sérieusement ébranlée.
Martine Bernier