Ce matin, je n’ai pas eu besoin de regarder par la fenêtre pour réaliser qu’il avait neigé.
Sans avoir allumé, l’appartement était baigné dans une lumière blanche et rose, provenant de l’extérieur.
Un coup d’oeil dehors a confirmé mes impressions: tout était blanc.
Les quelques flocons de la semaine dernières, qui avaient eu la bonne idée de fondre en quelques heures ne comptent pas.
Même si les montagnes sont déjà en hiver depuis quelques jours déjà, la plaine, elle, avait été épargnée jusqu’ici.
C’est terminé: cette neige-ci me donne l’impression de vouloir tenir.
Pomme, mon bichon havanais, a horreur de se mouiller les pattes.
La neige représente pour elle un élément étrange, à la fois rigolo et désagréable, selon son humeur.
A chaque changement de climat, il lui faut longtemps pour se réhabituer, pour prendre ses marques, pour se sentir à l’aise.
J’avais donc quelques craintes en sortant ce matin.
J’avais raison.
Elle a pris un air dégoûté, acceptant seulement de se livrer à une minutieuse inspection des lieux.
Il ne restait qu’un seul coin d’herbe a peu près épargné, sous un gigantesque sapin.
Elle a couru s’y réfugier, reniflant tout avec prudence, levant les pattes très haut à chaque pas.
Puis elle m’a lancé un regard pitoyable.
Pomme a des habitudes de chat.
Si elle joue partout, elle ne se soulage que dans certains endroits bien précis.
Ses « lieux de commodités » à elle que je m’applique à laisser impeccables après chacun de ses passages.
Hors, là, ses « toilettes » étaient recouvertes de neige.
Le regard que me lançait ma bichonne était clair: « Retire ce truc blanc, enfin! »
Comme j’ai aussi peu de sympathie qu’elle pour la neige, il m’a fallu du courage pour m’exécuter.
Pendant plusieurs minutes, j’ai dégagé la neige là où je savais qu’elle voulait aller, tandis qu’elle me regardait, sous son sapin, à l’abri des flocons qui continuaient à tomber drus.
Puis je suis allée me remettre à l’abri, sous l’avant-toit.
Avec un luxe de précautions impressionnant, sous mes encouragements, elle a consenti à se rendre là où je voulais qu’elle aille.
Elle a tout exploré, examiné, reniflé, gratouillé… avant de retourner sous le sapin pour se soulager discrètement dans un petit coin.
Puis je l’ai vue passer comme une bombe devant moi, filant sur le perron et me regardant avec un reproche au fond de l’oeil:
– Alors, tu l’ouvres cette porte, bourreau de Mogwaï?!
Je l’ai suivie et elle a grimpé les escaliers comme une flèche.
Arrivée dans l’appartement, elle m’a fait part de son dégoût devant l’état de ses pattes.
J’ai vérifié: aucune boulette de neige, juste un peu d’humidité.
Mais Pomme n’en démordait pas: pour elle, il y avait un problème.
Et dans ce cas, il faut agir.
En désespoir de cause, je me suis rendue dans la salle de bain et je l’ai appelée.
Elle est arrivée en courant et contrairement à ses habitudes, a sauté dans la douche sans se faire prier.
J’ai nettoyé ses pattes à l’eau tiède, les ai séchées et elle est repartie s’installer dans son panier pour une sieste bien méritée.
J’ai comme l’impression que l’hiver va être long.
Martine Bernier