Les trois J et les bourdons

Il était prévu depuis quelques semaines déjà que les trois J, Joël, Jean-Marc et la douce Josy, compagne de Jean-Marc, tous amis de mon Capitaine, viennent passer le week-end en Suisse, logeant à Chiboz la Jolie.
Un week-end très attendu placé à tout point de vue sous le signe de l’amitié.
Ce samedi donc, les retrouvailles se sont faites chez nous autour d’un petit repas, en compagnie de mon fils cadet avec lequel j’avais passé un moment privilégié le matin.
Mon Capitaine a des amis un peu partout à travers la France et bien au-delà des frontières.
Et ses amitiés sont belles…
Jean-Marc et Joël sont de solides gaillards, maniant l’humour et la fourchette avec la même aisance.
Bons vivants, cultivés, amis fidèles,  fans des « Tontons Flingueurs » ils sont chasseurs et pêcheurs dotés d’une solide éthique, ont des parcours de vie passionnants, tout comme Josy qui elle aussi chasse (en avouant ne jamais sortir son fusil…), a une passion pour les objets anciens et apporte une touche de féminité tranquille au petit groupe.
A table, très vite, les conversations ont repris là où nous les avions laissées la dernière fois que nous nous étions vus.

Entre anecdotes,   nouvelles des uns et des autres, et la recherche, dans l’un de mes livres, d’un tableau de Dali particulièrement aimé par Jean-Marc, l’ambiance est très vite passée au rire.
Les tirades fusaient, dont certaines resteront dans les annales, du genre:
– A l’époque, j’étais droit comme un i !
-… m’oui. Et aujourd’hui, tu es droit comme un z !

En fin d’après-midi, alors que mon fils avait repris le chemin d’Evian, nous sommes tous partis vers Chiboz,
Là encore, double bonheur: celui de retrouver nos amis Yolande et Michel et leur famille, et le charme de ce lieu magique blotti dans la montagne.
Toute l’équipe aime les mêmes choses, a les mêmes valeurs, et cultive l’amitié avec le même soin.
Pour tous c’était des retrouvailles puisqu’ils avaient déjà eu l’occasion de se découvrir lors de notre mariage.
Cette fois encore, ce fut idéal…
Yolande et moi, depuis que nous nous sommes découvertes, continuons à nous écrire plusieurs fois par semaine.
Nos rencontres sont toujours des moments de bonheur parsemés de conversations profondes, de rires et de découvertes.
C’est dans sa miellerie que nous avons retrouvé Michel.
Comme le disait Joël, cet homme, comme son épouse, est une encyclopédie vivante.
Nous avons beaucoup appris sur les abeilles et sur le miel… alors que nous avions pourtant quelques connaissances sur le sujet.
Il nous a fait goûter la cire imbibée de miel fraîchement récoltée des rayons, qui se déguste comme un chewing-gum, et nous a parlé des moeurs des abeilles… dont certaines coutumes ont traumatisé Joël, comme nous avons pu le réaliser bien plus tard dans la soirée.
Pendant que nous buvions ses paroles, Pomme jouait avec les « petites nanas » de Chiboz, Méline et Pauline, deux petits bouts de choux hauts comme trois pommes poussant des petits cris de joie en courant après mon bienveillant Mogwaï.
Après la miellerie, Michel, grand chasseur comme chacun des membres de sa famille, et connaisseur hors pair de la nature et de la montagne, nous a emmenés observer la faune, bien plus haut encore en altitude.
Nous nous sommes retrouvés dans un cirque montagneux, jumelles à la main, à guetter les parois…
Avec un peu de patience, nous avons pu observer des chamois, un chevreuil et un troupeau de bouquetins dans lequel bondissaient des cabris.
Une merveille…
De retour pour le repas au Relais des Chasseurs,  nous étions comblés, joyeux… et ravis de retrouver la délicieuse cuisine d’Emilie.
Emilie, Florine, Marie… les trois filles de Yolande et Michel sont des femmes adorables qui perpétuent la philosophie et le sens de l’hospitalité de leurs parents…
Yolande est venue nous rejoindre pour une douce conversation de fin de soirée.
Mais avant, avec nos compères très en forme, nous avons eu droit à un repas  rieur et toujours parsemé de bons mots.
A un moment, je découvre avec horreur un crayon que Pomme a trouvé sous la table, et auquel elle réglé son sort.
Je ramasse pieusement les restes du malheureux objets et les pose sur la table:
– Pomme a mangé un crayon…
– Super: demain, elle aura bonne mine!

C’est à table également que nous sommes revenus sur l’histoire des abeilles.
Ou plutôt sur le destin tragique des faux bourdons.
Ceux-ci, durant les premiers jours de leur vie, sont outrageusement gâtés et bien nourris par les abeilles en vue d’un seul but: le vol nuptial au cours duquel ils vont partir en bande d’environ 200 individus  féconder la reine.
Bien évidemment, seuls une dizaine ou une quinzaine d’entre eux arriveront à remplir leur mission.
Je savais déjà que les heureux élus meurent après l’accouplement, leurs organes génitaux ayant été arrachés en plein vol.
Quant aux autres, pas question de retourner à la ruche ensuite: ils y sont désormais indésirables et priés d’aller voir ailleurs.

Pour Joël, très préoccupé par le sort de ces mâles rejetés, la nouvelle de leur bannissement définitif a été rude.
Non seulement ils sont chassés, mais, en plus,  les femelles gardent la maison!
De mon côté, c’est le sort de la reine qui déclenche ma compassion plus que celui des bourdons SDF.
A peine quelques jours après sa naissance, la pauvre candide se pomponne pour la seule sortie de sa vie, sort de la ruche en folâtrant et là… elle se retrouve agressée par une meute de bourdons en délire!
Tsss…

Yolande, qui est passée maître dans l’art de nous transformer en gamins émerveillés, nous a montré  l’un des trésors de Chiboz: deux bézoards, dont l’un est vieux d’une trentaine d’années.
Ces boules séchées de poils et de différents déchets se trouvent notamment dans l’estomac de certains bouquetins.
Les bézoards sont comme la perle dans l’huître: rares et  prisés.
Prisés parce qu’ils ne se rencontrent donc pas souvent… et parce qu’on leur attribuait, entre autres pouvoirs, de puissantes vertus  aphrodisiaques.
Non, je ne vous raconterai pas la suite de la conversation!

Tard dans la nuit, mon Capitaine, Pomme et moi avons repris la route, laissant nos amis à Chiboz.
Et ce matin… nous nous apprêtons à y retourner!
Joyeux week-end…

Martine Bernier

 

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