Le destin de Berthe Morisot est la trame d’un véritable roman qui me fascine depuis longtemps… très longtemps, même.
Imaginez…
Elle est née à Bourges, en 1841, et partage son enfance avec sa soeur, Emma, qui comptera beaucoup pour elle.
Toutes deux adorent la peinture et suivent les cours de Joseph Guichard qui leur ouvrira les portes du Louvre pour qu’elles puissent y copier les oeuvres des Grands Maîtres.
Mais Berthe ne se sent pas l’âme d’une copiste.
Elle veut innover, peindre la nature.
En 1860, les deux soeurs intègrent l’atelier de Camille Corot, paysagiste de renom.
Elles ont autant de talent l’une que l’autre… suffisamment pour se présenter au fameux Salon officiel pour la première fois en 1864.
Dès cette date, elles y exposeront des toiles chaque année.
Edma et Berthe sont fusionnelles, inséparables…
Mais en 1869, Edma décide de suivre son mari, officier de marine à Lorient, et d’abandonner sa carrière.
Un crève-coeur pour Berthe qui continuera à représenter sa soeur à travers des tableaux comme « La Lecture », ou « Les lilas ».
Un an avant le départ d’Edma, Berthe a rencontré Edouard Manet.
Devenue son amie, elle accepte de poser pour lui (elle est notamment le personnage des toiles « Le Balcon » et « Le Repos »).
Modèle, oui… mais sans abandonner la peinture pour autant.
Son travail touche Edouard Degas qui lui propose de participer à la première exposition impressionniste.
Un hommage magnifique à une époque où l’École des Beaux-Arts n’acceptait que les élèves masculins!
Berthe Morisot est la seule femme du groupe, et expose à côté de Monet, Manet, Degas, Renoir et leurs collègues.
Son talent est reconnu, elle devient incontournable au coeur de ce mouvement novateur.
En 1974, elle se marie avec le frère d’Edouard Manet, Eugène, avec lequel elle aura une fille, Julie.
Tout en poursuivant sa carrière, elle voyage en Angleterre et en Italie, profite des étés niçois et des hivers à Bougival.
Dans la maison qu’elle se fait construire à Paris, elle reçoit peintres et écrivains, devient une figure marquante de son époque.
Et en 1892, elle expose seule pour la première fois, rencontrant un succès mérité.
Car ses tableaux sont fins, délicats, ce qui lui vaut des remarques ironiques de certains critiques la jugeant trop « féminine » à leur goût.
Berthe n’en a cure.
Elle joue avec la lumière pour parvenir à des effets de transparence magistraux et extrêmement difficiles à obtenir avec la peinture à l’huile.
L’exemple du tableau « Le Berceau », exposé au Musée d’Orsay est révélateur…
Son talent est reconnu par ses confrères qui l’estiment… les impressionnistes imposent une révolution qui n’est pas uniquement picturale!
La vie de Berthe Morisot a été courte.
En 1895, alors qu’elle n’a que 54 ans, elle meurt d’une congestion pulmonaire trois ans après avoir perdu son mari.
Elle est inhumée au cimetière de Paris.
Ses amis impressionnistes ont protégé sa fille, Julie, qui accompagnait Renoir lorsqu’il allait peindre….
Julie, dont le tuteur était Mallarmé, est restée liée au monde de l’art, puisque, en 1900, elle a épousé Ernest Rouart, fils d’Henri Rouart, grand collectionneur et ami de Degas.
Martine Bernier