Lorsque j’étais enfant, il était de coutume d’offrir aux petites filles de jolis cahiers dotés d’une serrure et d’une petite clé.
Pour les unes il devenait un journal intime, mais pour la majorité des autres, c’était différent.
Le cahier était confié aux amies et aux copines qui y dessinaient quelque chose et y écrivaient quelques lignes.
Parmi les bouts de poèmes tout faits que l’on retrouvait de manière récurrente, il y en avait un que je ne supportais pas:
« Tout passe, tout lasse, sauf l’amitié d’une compagne de classe. »
Je me disais que si celle qui écrivait ce genre de maxime y croyait, elle pouvait s’attendre à quelques déceptions…
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Au cours de cette semaine consacrée à nos retrouvailles, mon amie resurgie du passé m’a fait lire le contenu d’un carnet que j’avais écrit alors que j’avais 15 ans.
Je l’ai reconnu au premier coup d’oeil, mais je ne me souvenais plus de son contenu.
C’était un livret à la couverture tissée, d’inspiration asiatique, et aux pages imprimées de dessins rappelant les estampes japonaises.
J’aimais beaucoup ces cahiers que l’on trouvait beaucoup à l’époque.
Je les adoptais comme journaux intimes, je noircirais les pages de mon quotidien et de mes interrogations, puis je les brûlais.
Celui-là n’a pas subi le même sort.
J’y relatais au jour le jour la naissance de cette belle amitié, avec toutes les interrogations, les réflexions et les doutes liés à ce qu’il nous était donné de vivre.
L’expérience est étrange…
Je ne ressemble évidemment plus à cette jeune adolescente.
La vie et ses implacables leçons sont passées par là…
Et pourtant, cette amitié si ancienne, elle, est toujours là.
Parce que l’on ne peut baser une relation uniquement sur un passé lointain, nous apprenons à nous redécouvrir, nous comblons les espaces vides, et nous nous reconstruisons de nouveaux souvenirs.
C’est à cela que nous avons consacré cette semaine qui s’achèvera déjà demain…
Je ne crois toujours pas à l’inaltérable amitié des compagnes de classe, à quelques exceptions près.
Mais je crois à la loyauté, à la fidélité des sentiments par rapport aux êtres qui ne nous ont jamais trahis.
Dans ces cas-là, lorsque la confiance a été préservée et nourrie pas des événements forts, je crois qu’en effet, le lien peut rester intact…
Dans le cas présent, nous avons évolué dans des univers différents, nos goûts et nos passions sont presque à l’opposé les uns des autres, mais l’inexplicable alliage ne s’oxyde pas.
Nous nous sommes reconnectées…
Martine Bernier