La reprise!

Cette semaine, j’ai donc repris le chemin de l’un des périscolaires pour entamer mon nouvel atelier d’écriture.
C’était un jour très froid, où la neige et le gel rivalisaient d’imagination pour empoisonner la vie des automobilistes… et des piétons.
Plutôt contente d’être arrivée à bon port en un seul morceau, j’ai retrouvé quelques visages bien connus, et… j’ai découvert le groupe d’enfants avec lesquels je vais m’engager pour plusieurs mois dans cette aventure.
Ils sont huit, ce qui est vraiment bien pour un atelier de ce type, âgés de 6 à 11 ans.
Comme toujours, la première demi-heure est toujours la plus délicate: il faut faire connaissance, camper le décor du travail qui nous attend, expliquer les enjeux et leur donner envie de partir avec moi sur les chemins buissonniers…
Difficulté supplémentaire: comme nous avons parmi notre groupe deux garçonnets de six ans qui ne savent pas encore écrire, il faut s’adapter pour qu’ils se sentent aussi importants que leurs aînés dans notre « comité de rédaction » qui nous permettra de créer notre journal.
Le thème qui m’a été octroyé est lourd, j’en ai déjà parlé, puisqu’il s’agit de la pauvreté… que nous allons faire déborder sur la solidarité.
Rester dans la théorie et rien que dans la théorie risque de décourager rapidement mes petits journalistes.
J’ai donc décidé qu’il y aurait un fil rouge à notre travail, qui allait leur permettre de mieux identifier le problème de la pauvreté.
Au menu de cette première rencontre, je leur ai demandé d’inventer chacun un personnage.
Un enfant dont ils créeront l’histoire, l’origine et l’identité, avec une seule consigne: ils devaient tous se retrouver en France et vivre une situation de précarité.
Pas à pas, j’ai pu les amener à rentrer dans cette première expérience, et, à la fin des 90 minutes qui nous ont été octroyées (et que nous avons allègrement dépassées…), chacun avait déjà campé les bases de la vie de son ou sa protégé(e).
Il y a Mika, arrivée de Chine, Makali venue d’Afrique, Simon arrivé d’Allemagne… au total huit enfants aux destins différents qui vont s’affiner au fil des semaines.
Cette première étape m’a permis de comprendre à quel point les enfants sont marqués par les événements qui secouent le monde.
Chacun, lors d’un tour de table, a présenté son personnage.
Et la petite Camille, 8 ans, nous a expliqué que Mika a quitté la Chine avec ses parents pour aller rejoindre de la famille… en Ukraine!
Là, horreur, ils découvrent que la guerre bat son plein, et reprennent la route pour se réfugier en France, dans le Nord… où ils arrivent dans une région complètement inondée.
Le moins que l’on puisse dire, c’est que cette pauvre famille n’a pas de chance!
Au moment où je rangeais le matériel, à la fin de notre première séance, Bastien, 8 ans lui aussi, me demande:
– Tu veux voir mon dessin?
– Oui! Bien sûr!
Il me montre un petit personnage dont le visage et le corps sont couverts de taches rouges.
– Heu… c’est la varicelle?
– Non: ce sont des blessures.
– Oups… il ne va pas bien du tout, ton bonhomme…
– Oui, il vient d’un pays en guerre.
Songeur, il regarde son dessin et me dit:
– Il ne faut pas que l’on croit qu’il a la varicelle. Je voudrais que l’on comprenne tout de suite qu’il est blessé. Je pense que je vais lui couper une jambe!
– C’est plutôt radical, mais c’est toi qui décides… Écoute, je te propose de réfléchir à l’histoire que tu as envie de lui donner et, la semaine prochaine, on en reparle.
– D’accord. Je peux te donner mon cahier? J’ai peur de l’oublier la semaine prochaine.
J’ai glissé le cahier dans mon sac.


J’ai poursuivi, en m’adressant cette fois au groupe:
– Est-ce qu’il y a déjà un ou deux d’entre vous qui ont écrit un petit bout de l’histoire des personnages?
Quatre d’entre eux m’ont montré leurs cahiers: ils avaient pratiquement écrits une voir deux pages complètes chacun.
– Vous êtes des as! Bravo! La semaine prochaine on continue et vous passerez l’un après l’autre à l’ordinateur pour taper vos textes.
– Mais on ne sait pas taper sur les claviers…
– Je vous guiderai!
– Et si on fait des fautes d’orthographe?
– Nous les corrigerons…

Lorsque nous nous sommes tous retrouvés dans l’escalier pour regagner le périscolaire, je leur ai demandé:
– Alors? Cette première séance vous a plu?
J’ai eu droit à des réactions enthousiastes…
– Vous avez envie de continuer?
Le « oui » a été unanime.
Ouf…


par

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *