D’un côté, les Etats-Unis prévoient d’envoyer par-delà les nuages leurs premiers « voyageurs de l’espace » dans deux ans.
De l’autre, les premiers touristes galactiques européens pourront accomplir le voyage en 2012.
Que devront faire les nantis désireux d’aller admirer un clair de Terre?
Ils devront s’adresser à l’une des cinq agences de voyage partenaires de Virgin Galactic, firme de tourisme spatial.
Puis ils débourseront 200 000 dollars pour pouvoir s’élever à 110 kilomètres d’altitude pendant environ une heure et demie.
D’autres agences, dont une filiale japonaise, proposent un voyage de 6 jours et 4 nuits en apesanteur, à 100 km d’altitude.
Le prix du billet n’est pas précisé. Dommage, ça fait un joli petit Noël.
Et comme, lorsqu’il s’agit de réaliser de juteuses affaires, l’imagination de certains est débordante, la société Celesis s’est, elle, spécialisée dans les funérailles spatiales.
Les cendres de 150 défunts ont déjà été déversées dans l’univers.
Alors que, sur notre bonne vieille Terre, les discours sont de plus en plus alarmants, nous pressant de lutter contre la pollution qui abîme notre planète, alors que l’on nous conseille de préférer le train à l’avion, de laisser les voitures au garage dès que possible, d’autres humains développent donc une manière de dépenser un argent fou et une énergie colossale uniquement pour qu’une poignée de riches capricieux puissent s’offrir des sensations fortes.
Je n’ose même pas penser au discours de ceux qui en reviennent.
Jusqu’ici, nous avions droit à ceux qui ont « fait » l’Australie, la Thaïlande, l’Egypte etc… et qui le racontent à qui veut l’entendre sans réaliser que, dans leur public choisi, certains ne pourront peut-être jamais dépasser les frontières de leur région, faute de moyens.
Maintenant, il faudra donc endurer les récits des richissimes voyageurs de l’Espace.
J’avais rencontré et écouté Claude Nicollier, merveilleux astronaute suisse, qui a navigué dans l’espace dans le cadre, lui, de son travail,
Cet homme modeste, érudit et passionnant, avait un discours à la fois scientifique et humain.
Son aventure, il en parlait avec des mots qui la rendaient exceptionnelle.
Elle avait un sens, était utilisée pour la recherche, l’avancement de la sciences.
Ces touristes, eux, qu’apporteront-ils, si ce n’est une pollution indécente et un gaspillage d’argent destiné uniquement à leur permettre de voir la Terre depuis en haut?
Outre le côté indécent de la chose, je crois profondément que certains domaines doivent restés inaccessibles.
Claude Nicollier et ses collègues ont étudié, travaillé des années pour se préparer à la conquête spatiale.
Ce sont tous des gens bardés de diplômes, pointus dans leurs domaines.
Ces « touristes » nouveau genre, eux, se contentent d’être riches et d’en profiter.
Ceux qui sont déjà partis (parce que cela se fait déjà depuis 2002!) expliquent qu’ils ont voulu réaliser un rêve.
Un rêve…
Certains n’ont d’autres rêves que de pouvoir manger tous les jours et d’avoir un toit pour la nuit.
Alors le rêve d’aller dans l’espace… oui, à mes yeux, c’est une obscénité.
Ah tiens, j’oubliais.
Comme les vols vont se multiplier, mathématiquement parlant, les accidents augmenteront eux-aussi.
Ce qui sera du pain béni pour les journaux télévisés et autres, qui détailleront longuement ce type de « catastrophes ».
Pardon d’avance: à la première navette touristique qui ne reviendra pas, je n’aurai pas le coeur brisé.
Même si les explosions de Challenger ou de Columbia m’avaient peinée, elles…
Parce que, encore une fois, celles et ceux qui étaient à bord ne s’y trouvaient pas par caprice.
Martine Bernier