Ignace de Loyola et le grand virage

Chacun d’entre nous possède son propre Panthéon de personnalités que nous admirons ou qui nous intriguent.
Il y a deux jours, dans la conversation, mon compagnon m’a dit: « Tu ne connais pas Ignace de Loyola? »
Il paraissait surpris.
J’avoue humblement que les seules références liées au prénom d’Ignace évoquent pour moi une très vieille religieuse qui tenait le rôle de pion pendant nos heures d’études, à l’école, ou l’air angélique de Fernandel quand il jouait au benêt de service…

Donc, non, j’avoue, je ne connaissais pas vraiment ce monsieur.

Comme Il n’a pas pour habitude de s’extasier devant le premier venu, je me suis penchée sur le sujet durant ses heures de sommeil.
Je comprends que le début de la vie du personnage ait pu séduire un ancien militaire de carrière…
Né au Pays Basque espagnol le jour de Noël de 1491, cadet d’une famille de treize enfants (pensée compatissante au passage pour la maman…), celui qui fut baptisé Inigo arrivait dans le monde par la porte de la petite noblesse.
Orphelin de mère à 7 ans, il développe une belle relation avec son père et bénéficie d’une éducation sérieuse.
En 1506, il devient page de Cour, puis secrétaire, gentilhomme et vit durant dix ans au sein de la Cour d’Espagne, proche de la princesse Catalina, soeur de Charles-Quint.
En 1517, il entre dans l’armée et participe à des batailles mémorables. Mais une blessure, dont il gardera comme séquelles une jambe devenue plus courte que l’autre, lui interdit de réintégrer l’armée.

C’est là, à mon sens, que la vie d’Ignace devient étonnante.
Tandis qu’il est convalescent, il se distrait en lisant.
Et comme il ne trouve aucun livre de chevalerie à se mettre sous la dent, il se rabat sur les ouvrages religieux.
C’est pour lui une révélation.
Sa vie va prendre un virage à 180 degrés.
Dans ses rêves, il voit apparaître la Vierge mère, et se met à concevoir un rejet prononcé pour la vie qu’il a menée.
Le métier des armes, son attirance pour les femmes lui font désormais horreur: il veut devenir ermite.
Le brave homme.
Le nouveau but de sa vie devient la conversion des « infidèles » musulmans, en Terre Sainte, et il part de pèlerinage en pèlerinage.
Convertir plutôt que tuer ou faire prisonnier… son esprit de conquistador n’est pas calmé.
A Jérusalem, il se confesse, troque ses armes contre une robe de bure et retourne en Europe où il devient ermite ascétique.
Par la suite, il fera plusieurs voyages à travers le monde, mais l’intérêt de son existence est autre.

Pendant onze ans, il va étudier, la philosophie, la théologie, devient un érudit, adoré par les uns, controversé par d’autres.
Des étudiants le suivent, il enseigne par l’exemple une foi marquée par sa rigueur naturelle: il assume la discipline, la pauvreté et la chasteté… et crée la Première Compagnie de Jésus ou l’Ordre des Jésuites.
Il laissera de nombreux écrits qui ont accompagné ses descendants spirituels sur leur chemin.

Je ne suis pas sûre que la trajectoire d’Ignace de Loyola me séduise.
Les Jésuites ont fait de bonnes choses, et d’autres, moins bonnes.
Mais je comprends que l’on puisse être troublé par le changement de vie magistral qu’il a adopté.

S’il ne me trouble pas spécialement, Celui qui m’en a parlé, Lui, m’intrigue de plus en plus.

Quand je lui ai dit que je me suis documentée sur cet homme et que je ne comprenais pas vraiment pourquoi il l’admirait, il a souri et a plongé sur moi ce regard si particulier qui est le sien:
– Mais… qui t’a dit que je l’admirais?

Martine Bernier

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